Il est de ces avis qui font mal. Celui de la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAE) en est la parfaite incarnation. Rendu dans le cadre de la révision du PLU de Carignan et des retours des Personnes Publiques Associées (voir également ICI), il dresse un portrait sans concession et inquiétant du travail conduit par le maire et sa majorité.
L’intégralité du document est consultable en ligne ; vous pouvez le retrouver ICI. Vous pouvez également choisir de vous référer aux extraits choisis que je synthétise à la fin de cet article.
Quoi qu’il en soit, la conclusion de l’Autorité environnementale est édifiante :
« L’Autorité environnementale estime que le projet manque d’explications sur de nombreux points quant à la manière dont il a été établi, que ce soit du fait d’un horizon temporel fluctuant ou d’un fondement de projet basé seulement sur un rythme de construction. Les objectifs communaux mériteraient d’être clairement établis et suffisamment expliqués afin que le public puisse appréhender d’une part, la manière dont le projet a été élaboré, notamment au regard des éléments issus du diagnostic socio-économique, et d’autre part, comment le projet répond aux exigences de modération de la consommation des espaces. L’analyse de l’état initial de l’environnement nécessite également d’être complétée et remise en cohérence au regard des différents éléments de connaissance présents dans le dossier. En ce qui concerne la prise en compte de l’environnement, le dossier mérite d’être largement amendé et certaines affirmations d’être davantage étayées. Ainsi, le maintien d’un vaste secteur mixte, dédié à l’habitat et à l’économie sur le site de « Lalouga », devrait être particulièrement justifié au regard des sensibilités environnementales identifiées et de l’absence de démonstration du besoin d’une telle surface en matière de développement économique. L’Autorité environnementale estime nécessaire également, et tout particulièrement, de compléter le dossier en ce qui concerne l’adéquation des capacités de traitement des eaux usées, quel que soit le mode de gestion des eaux, avec le projet de développement, tant de l’habitat que de certaines activités. L’impact potentiel de la mise en œuvre du projet sur l’environnement à cet égard apparaît largement sous estimé, et de ce fait, l’évaluation des incidences Natura 2000 également insuffisamment étayée ».
Document incomplet et confus, motivations obscures et injustifiées, faux calculs, destructions des milieux naturels et graves incidences environnementales ou sur la santé humaine… Au secours ! Pourtant, bravache, Frank MONTEIL « garde le cap » comme il le rappelait encore le 8 janvier dernier à l’occasion de ses vœux à la population. Alors que les alertes se multiplient de toute part et que la démonstration est faite qu’il va dans le mur, quel but poursuit-il réellement ? Et sa majorité ? Va-t-elle enfin réagir et cesser de suivre aveuglément son chef omnipotent ? MESDAMES ET MESSIEURS, RÉVEILLEZ VOUS !
Ci-après, les extraits choisis de l’avis délibéré de la MRAE sur le projet de révision du PLU de la commune de Carignan-de-Bordeaux…
UN DOCUMENT INCOMPLET :
Sur LALOUGA (page 5), « la carte de synthèse présentée dans le rapport de présentation sous estime la présence avérée de [très nombreuses espèces protégées], de leur habitat, ainsi que d’espaces propices à leur cycle biologique, en qualifiant le niveau d’enjeu écologique de « moyen » ». Ainsi, « l’Autorité environnementale recommande de compléter l’analyse de l’état initial de l’environnement pour y intégrer l’ensemble des enjeux identifiés dans le dossier de PLU, afin de constituer un élément de connaissance suffisamment mobilisable tant pour les élus dans leurs choix que pour le public dans la compréhension de la prise en compte des enjeux environnementaux ».
Sur l’assainissement (page 5), « l’Autorité environnementale recommande de compléter les indications concernant l’assainissement collectif par des informations sur la programmation de la réhabilitation de la station communale, au regard des dysfonctionnements identifiés et des leurs impacts environnementaux potentiels ».
UN DOCUMENT CONFUS :
« Le projet communal est fondé sur un horizon temporel fluctuant, oscillant entre 2025, 2030 ou une durée estimée de 10-11 ans voire de 13-14 ans. Il paraît impératif de fixer l’échéance envisagée pour la mise en œuvre du PLU, tant celle-ci influe sur les autres éléments de projet. En l’état, la multiplicité des durées envisagées nuit considérablement à la limpidité des explications liées à l’accueil de population, aux objectifs de construction ou à la mise en œuvre d’une démarche de modération de la consommation des espaces agricoles, naturels et forestiers du fait de la présence de nombreux calculs liés à la durée du PLU. L’Autorité environnementale recommande fortement d’harmoniser l’horizon temporel du document au sein du rapport de présentation afin de bénéficier d’une information suffisamment claire et mobilisable » (page 5).
DES MOTIVATIONS OBSCURES, DE FAUX CALCULS :
Sur la démographie et le logement (page 5), « le projet communal souffre particulièrement d’un manque d’accessibilité et d’explications de ce point de vue. En effet, tant au sein du rapport de présentation que du PADD, il ne semble être construit que sur la seule hypothèse de réalisation de 54 logements par an, avec un horizon temporel variable (2025 ou 2030), aboutissant à estimer les besoins entre 486 (durée de 9 ans) et 756 logements supplémentaires (durée de 14 ans). En outre, aucun élément d’étude ou de prospective ne vient expliquer les raisons ayant mené à retenir un tel objectif qui abouti au doublement de la tendance constructive connue lors de la dernière décennie ».
En outre (page 6), « le projet démographique n’est connu que par une application stricte, mais erronée, de la multiplication de l’objectif de construction par la taille moyenne des ménages, sans tenir compte du besoin lié au point mort (…). »
« L’Autorité environnementale recommande fortement que le projet communal de Carignan-de-Bordeaux soit clarifié, argumenté, mis en cohérence et présenté de manière accessible pour le public dans l’ensemble de ses composantes afin de comprendre la manière dont il a été établi ». (page 6)
De même, « l’Autorité environnementale recommande de compléter l’ensemble des développements du rapport de présentation relatifs à la consommation d’espace, et d’y apporter les justifications nécessaires permettant d’opérer une réelle démonstration de la mise en œuvre d’une démarche d’économie d’espaces ». (page 6)
LA DESTRUCTION DE MILIEUX NATURELS :
Sur LALOUGA (page 7), « le projet de PLU intègre la réalisation d’un vaste secteur d’activités économiques au sein d’une zone AUY de 11,9 ha, ainsi que trois opérations à vocation d’habitat (…). Or, [ce secteur présente] une forte sensibilité environnementale (…), du fait notamment de la présence avérée d’espèces protégées ou de leurs habitats. L’Autorité environnementale souligne qu’aucun élément d’explication du PLU ne vient indiquer de quelle manière ces enjeux majeurs ont été intégrés dans le processus décisionnel aboutissant au classement AUY du secteur, qui permet l’artificialisation de l’ensemble des espaces présents. En outre, le secteur est identifié, au titre de la trame verte et bleue, comme participant à une « continuité [écologique] à remettre en bon état » sans que l’OAP ou le règlement écrit ne prévoit des mesures particulières en la matière. Ainsi, le projet de PLU ne démontre pas une prise en compte suffisante de l’environnement concernant le développement du secteur de « Lalouga », en ce qu’il n’apparaît pas avoir mis en œuvre, en premier lieu, les étapes fondamentales et nécessaires de la recherche de l’évitement des impacts dans le choix de localisation de ce secteur. L’Autorité environnementale recommande d’apporter l’ensemble des éléments d’information permettant de s’assurer de l’absence d’impact environnemental du développement de ce secteur, ainsi que de procéder à la démonstration de la mise en œuvre de la démarche d’évitement des impacts environnementaux. »
Sur le projet oeno-touristique « Château Carignan » (pages 7, 8), « le rapport de présentation indique que [ce dernier] a pour objectif d’accueillir un parking sur une surface de 1,1 ha. L’Autorité environnementale note que ce secteur est situé dans un espace actuellement boisé, inscrit au sein des réservoirs de biodiversité, ainsi que dans un corridor écologique (…). Cet espace comprend en outre plusieurs arbres d’intérêt pour les espèces saproxylophages ou les chiroptères (…). L’Autorité environnementale relève que l’aménagement de ce parking réduit de façon considérable la continuité verte identifiée dans le document. De plus, le rapport de présentation ne contient aucune alternative de localisation du projet dont les impacts n’apparaissent pas suffisamment estimés au regard notamment de la présence d’un plan d’eau à proximité présentant un intérêt écologique qualifié de majeur (…). En ce qui concerne le projet touristique du secteur Aot, le rapport de présentation indique qu’il ne pourra pas être raccordé au réseau d’assainissement collectif, au regard de l’estimation projetée du volume d’effluents, (…) et de l’incapacité de la station communale à accueillir une telle charge en plus de celle engendrée par l’accueil de population. L’Autorité environnementale souligne qu’il est impératif d’apporter de plus amples explications en la matière afin de s’assurer que le développement de ce secteur, dont les sols présentent des difficultés pour la mise en œuvre de dispositifs d’assainissement non-collectif, n’engendrent pas d’impacts significatifs sur les milieux naturels ou la santé humaine. Cette problématique doit également être développée pour l’ensemble des « unités d’accueil » essaimées au sein de la zone agricole (…). L’Autorité environnementale recommande de compléter le rapport de présentation par une démarche [Épargner/Réduire/Compenser] suffisante pour intégrer l’impact potentiel sur l’environnement de la transformation du secteur du « Château de Carignan », que ce soit du fait de l’aménagement d’un vaste parking sur un secteur identifié comme milieu naturel sensible ou au regard de la mise en œuvre des dispositifs de traitement des eaux usées. »
DES INCIDENCES ENVIRONNEMENTALES CATASTROPHIQUES ; UN PROJET NUISIBLE :
Sur l’assainissement (page 8), « les conclusions relatives à la capacité de la station communale indiquent que la station ne sera pas en mesure de traiter les effluents engendrés par la mise en oeuvre du projet de PLU. En outre, aucune information suffisante n’est fournie quant à la programmation et au financement tant des études nécessaires que des travaux pouvant permettre de s’assurer du déploiement prochain d’un équipement en capacité de gérer les effluents engendrés par le projet de PLU. En l’état, et en l’absence de toute mesure de phasage de l’urbanisation au regard des capacités de la station, l’Autorité environnementale estime que la mise en oeuvre du projet de PLU porte une atteinte significative tant sur l’environnement que sur la santé humaine. L’Autorité environnementale estime nécessaire de conditionner les ouvertures à l’urbanisation au déploiement effectif de solutions suffisantes pour gérer les effluents engendrés par la mise en œuvre du projet communal. En ce qui concerne l’assainissement non collectif, (…) l’absence de carte d’aptitude des sols à l’infiltration des sols nuit fortement à l’appréciation de l’impact potentiel sur les milieux naturels de ces développements importants. Ainsi, la conclusion estimant que le recours à ce mode d’assainissement devrait avoir un impact réduit sur la ressource en eau et les milieux aquatiques n’est pas démontrée. Les défauts d’argumentation concernant l’assainissement affectent également les conclusions de non atteinte significative à l’intégrité du réseau Natura 2000″.
Enfin (page 8), « l’analyse de l’état initial de l’environnement a permis d’identifier les réservoirs de biodiversité et les continuités écologiques existants sur la commune dont notamment les continuités à remettre en bon état. Toutefois, la traduction de cet objectif apparaît insuffisante dans le projet retenu qui repose principalement sur l’identification, au sein des OAP, de secteurs à préserver en périphérie des zones de projet retenues, sans prendre en compte l’état existant de l’environnement. En outre, il conviendrait d’apprécier plus finement l’impact du choix retenu qui consiste à créer de nombreuses haies périphériques au sein d’espaces de plaine, qui pourraient, selon les secteurs, constituer des éléments de fragmentation des continuités écologiques ».